Radiation de Barthélémy Dias: Bougane dénonce une démocratie sous influence et brandit la jurisprudence de 1993

La radiation de Barthélémy Dias, maire de Dakar et député, de l’Assemblée nationale a résonné comme une onde de choc dans le paysage politique sénégalais. Qualifiée par certains de « séisme institutionnel », cette décision relance le débat sur l’indépendance de la justice et la légitimité des institutions face à des choix populaires pourtant validés. Bougane Guèye, leader du mouvement «Gueum Sa Bopp, les jambages», s’empare de l’affaire pour dénoncer ce qu’il considère comme une «justice sélective des vainqueurs » et exhorte à une résistance citoyenne face à la tyrannie.

Barthélémy Dias a été évincé de son mandat sous prétexte de l’article 61 de la Constitution, qui permet de radier un député en cas de condamnation pénale définitive survenue pendant la législature. Pourtant, comme le rappelle Bougane Guèye, la condamnation de Dias était connue avant son investiture, validée à la fois par les institutions compétentes et par le vote populaire. « C’est un coup de jarnac contre la souveraineté du peuple, une violation flagrante de l’article 7 de la Constitution qui consacre le pouvoir du peuple comme source de toute légitimité », fustige Bougane. 

Le leader de Gueum Sa Bopp interroge également la cohérence du système judiciaire et institutionnel : « Comment peut-on appliquer avec rigueur l’article 61 à Barthélémy Dias tout en fermant les yeux sur la situation d’Ousmane Sonko, déclaré inéligible par une décision définitive du Conseil constitutionnel, mais toujours en fonction ? » 

Bougane Guèye rappelle une décision clé du Conseil constitutionnel, la décision n° 5 du 2 mars 1993, qui établit que, même en cas de lacunes ou de silences de la loi, le Conseil doit statuer dans l’intérêt de l’État de droit. Pour lui, cette jurisprudence aurait dû servir de socle pour analyser la validité des candidatures ou mandats, y compris celui d’Ousmane Sonko, désormais Premier ministre. « Si les règles d’inéligibilité sont d’ordre public, pourquoi cette souplesse apparente lorsqu’il s’agit d’un homme qui concentre autant de pouvoir ? », s’interroge Bougane avec gravité. 

Le Conseil constitutionnel, estime-t-il, « manque de courage », préférant des interprétations minimalistes de ses compétences lorsque les enjeux sont trop sensibles. « C’est une dérive inquiétante qui pousse notre pays vers une crise institutionnelle profonde », alerte-t-il. 

Face à ce qu’il qualifie de « déséquilibre institutionnel », Bougane Guèye propose une riposte coordonnée et démocratique. Il appelle à : 

1. Saisir le ministre de la Justice pour demander des comptes sur les procédures opaques ayant permis à Ousmane Sonko de conserver ses droits civiques malgré sa condamnation. 
2. Exiger la transparence à l’Assemblée nationale, notamment sur les lettres de démission ou de suspension des députés concernés par des procédures judiciaires. 
3. Créer un Front Unique réunissant partis politiques, médias indépendants et société civile pour défendre les principes fondamentaux de la République. 
4. Mobiliser les intellectuels sénégalais pour réfléchir à des solutions durables afin de préserver l’État de droit. 

Pour Bougane Guèye, cette affaire n’est pas seulement un épisode isolé, mais un symptôme d’un malaise plus profond: une instrumentalisation des institutions pour des intérêts partisans. « Si nous laissons faire, le Sénégal risque de perdre son statut d’exemple démocratique en Afrique », avertit-il, avant de conclure : « La résistance face à la tyrannie est un devoir. Ce combat dépasse les partis, c’est une question d’héritage pour les générations futures. »

Dans un climat déjà tendu, cette prise de position pourrait bien redéfinir les rapports de force à l’approche des prochaines échéances électorales. Mais une chose est claire : l’affaire Barthélémy Dias est loin d’être close, et le débat sur l’équité et l’indépendance de la justice sénégalaise ne fait que commencer.