Comment comprendre que des régimes militaires incapables d’affronter des terroristes en haillons et motos Jakarta bombent le torse pour défier l’ECOMOG ?
Pour rappel, la force militaire de la CEDEAO dans un passé récent a eu à réussir des interventions énergiques pour restaurer la paix, la sécurité et l’ordre républicain entre autres au Libéria, en Sierra Leone, en Guinée-Bissau, en Côte d’Ivoire et en Gambie.
Après le Niger, ceux qui ont lancé le « chapelet de coups d’Etat » en Afrique de l’Ouest s’attaqueront tôt ou tard (si ce n’est encore en sourdine le cas) aux autres pays démocratiques dont le Nigéria qui possède un PIB de 440 milliards de dollars, largement devant les 15 milliards de dollars de PIB du Niger.
Et pourtant le Niger (1 267 000 de km2) est largement plus vaste que le Nigéria (923 000) km2 alors qu’avec ses 213 millions d’habitants, le géant anglophone est largement plus peuplé que le Niger (25 millions d’habitants).
L’option de la CEDEAO au dilemme nigérien est un choix cornélien :
- soit de faire face pour stopper l’envie des nouveaux conquérants qui tirent les ficelles
- ou bien se faire avaler un à un par ces mêmes nouveaux conquérants un jour.
En Gambie, le Sénégal était en « front office » pour déloger Yaya Jammeh avec le soutien déterminant du géant anglophone nigérian.
Au Niger, pays francophone, le même géant anglophone nigérian sera à coup sûr en « front office » si l’option militaire se déploie. Dans ce cas de figure, le Sénégal et les pays démocratiques de la CEDEAO ne peuvent moralement et stratégiquement pas ne pas s’impliquer si nécessaire sur le théâtre des opérations.
Les peuples doivent savoir que les nouveaux conquérants qui se déploient actuellement en Afrique de l’ouest ne le font pas pour nos beaux yeux, mais pour se préparer à l’escalade d’une confrontation mondiale des deux blocs (Est-Ouest) en conflit latent depuis fort longtemps.
Nous devons faire confiance aux autorités démocratiquement élues de nos pays dont le niveau d’information plaide largement pour un arrimage lucide aux options de la CEDEAO qui est en train de faire l’effort d’équidistance vis-à-vis des deux blocs. La position historique de neutralité de l’Afrique dans guerre Russo-Ukrainienne est une preuve palpable d’équidistance.
Le défi de nos intellectuels africains est de faire comprendre, sans œillères idéologiques, à nos peuples que le discours populiste ambiant n’est pas libérateur. Les nouveaux conquérants veulent faire de l’Afrique de l’Ouest une zone de guerre de la prochaine grande confrontation mondiale qui se prépare. C’est pourquoi, chaque populiste qui s’oppose aux valeurs républicaines bénéficie des soutiens directs ou indirects des nouveaux conquérants qui ont compris que l’Afrique est le ventre mou sécuritaire de la planète. Les nouveaux conquérants politiques ne sont pas seuls aux manettes de l’instabilité. D’autres loups aux motivations diverses sont dans la bergerie et il arrive hélas qu’une partie de nos peuples prennent ses loups pour des agneaux. - Le dépeçage économique de la République Centrafricaine en plusieurs « mangeoires » devrait alerter sur la nécessité d’une force africaine d’intervention capable de restaurer et garantir partout le choix libre et démocratique des peuples.
L’ECOMOG en Afrique est le seul grand instrument militaire sous-régional comme des prémices de la grande armée africaine. C’est pourquoi sur la question du Niger, il faut soutenir l’option de la CEDEAO.
Avant la guerre, il reste évident qu’il faudra rechercher dans la mesure du possible les modalités d’un départ paisible des « voleurs de suffrages » appelés putschistes avec un euphémisme et populisme coupable.
Pour éviter l’instabilité permanente, il nous faut tout de suite défendre à tout prix les régimes élus librement par les peuples. Le régime du Président Bazoum du Niger est dans le lot des démocraties à défendre et protéger.
En vérité, au Niger, se joue une expérience grandeur nature de propagation accélérée d’une grande instabilité aux portes du géant nigérian qui a eu à subir au début des indépendances une tentative de dépeçage avec la guerre du Biafra. L’accepter aux portes du Nigeria, c’est fragiliser un tout nouveau régime démocratiquement élu. Les loups, après la bergerie, sont dans la cœur du corps Afrique.
Ne rien faire en laissant le Niger à lui-même , c’est signer l’inéluctabilité de la fin des processus démocratiques africaines et instituer comme au début des indépendance la loi des forces armées.
Il faut préserver l’Afrique de la grande confrontation que préparent les deux blocs hégémoniques du monde. Il faut surtout extirper le terrorisme des terres africaines et, conformément aux orientations de la ZLECAF, faire de l’Afrique un bloc économique et social vertueux homogène pour le développement endogène du Continent. Ce développement passera inéluctablement par la résolution des équations sécuritaires, démocratiques et logistiques majeures.
Mamadou NDIONE
Économiste Écrivain