L’association «And samm cosaanu Ganjool » qui regroupe, pour l’essentiel des habitants et ressortissants de cette province située dans le bas Sénégal, au sud de la ville de Saint louis, s’est engagée dans le processus de promotion et de réhabilitation de son patrimoine culturel, artistique et historique. Elle envisage d’initier un ensemble d’actions pour faire connaitre aux générations présentes et futures les fondements sur lesquels repose le substrat culturel de Ganjool. La mise en place de son peuplement et de ses institutions, les relations avec ses voisins, la dynamique de sa population face aux mutations de la Sénégambie septentrionale et les grands moments de son évolution, sont autant de problématiques qu’on est en droit de soulever pour nous faire une philosophie sur ce qu’est le Ganjool, comprendre son passé pour lui construire un avenir radieux.
Cette recherche n’est pas simplement un exercice intellectuel ou scientifique mais c’est un enjeu civique et même moral, comme le dit Jacques Le Goff dans sa préface à l’admirable ouvrage de Marc Bloch « l’apologie pour l’histoire ou métier d’historien ». L’histoire est, en effet, la science qui étudie les hommes dans leur temps, pour comprendre l’évolution de leurs sociétés, trouver des réponses aux comportements d’aujourd’hui et des enseignements pour l’avenir ; « une science nous paraîtra toujours avoir quelque chose d’incomplet si elle ne doit pas, tôt ou tard, aider à mieux vivre », écrit Marc Bloch. C’est dire que cette discipline est source d’affinement de l’esprit et viatique pour la formation d’un type d’homme. L’histoire a donc cette double fonction de former et d’éduquer les hommes. Commémorer la bataille de Safilem, c’est donc consacrer un patrimoine immatériel qui devra servir de viatique à tous les Ganjool-Ganjool.
Cette bataille qui eut lieu au début du XIXème siècle, au moment où la France reprenait aux anglais ses anciennes colonies, sonne comme un cri de guerre ou d’extase pour les uns, d’effroi ou de catastrophe pour les autres ; elle se termina par la défaite des troupes coloniales. Cet événement marque la fin d’une époque dans les relations entre le Ganjool et ses voisins et ouvre une nouvelle ère pour ses populations.
Cette rencontre sur la bataille de Safilem, organisée par l’association «And Samm Cosaanu Ganjool » permettra aux panelistes de situer le contexte de cette confrontation, de présenter ses enjeux, de décrire les péripéties de la guerre et d’en tirer les conséquences. Elle sera pour nous autres historiens et amateurs de l’histoire, une occasion pour confronter nos certitudes avec la réalité du terrain, en un mot, confronter les sources et répondre à cette boutade d’un de mes collègues « Est-ce que le récit du Dyali est moins historique que le récit de l’historien professionnel ».
En effet, faire l’histoire de la bataille de Safilem devant cette auguste assemblée donnera à l’historien professionnel l’occasion de s’exercer à un exercice périlleux : analyser un fait historique à l’aune de la mémoire collective, c’est-à-dire du récit des traditionalistes, des généalogistes et des griots. Elle favorisera une riche confrontation entre les tenants de l’histoire traditionnelle et celle des professionnels du métier, entre l’histoire et la mémoire, la connaissance et la compréhension, et de découvrir de nouvelles pistes dans la recherche en Histoire.
La table ronde sera organisée autour de trois thèmes majeurs dans lesquels, les différents acteurs, dans leurs interventions, apporteront leur modeste contribution à la découverte et à la valorisation du patrimoine historique et culturel de Ganjool
L’historien professionnel, essaiera de reconstituer cette fameuse bataille de Safilem en la situant dans le contexte du déclin de la traite des esclaves et des relations heurtées entre la colonie et les pouvoirs politiques de l’intérieur.
La tradition orale a travers le récit des griots, des tenants de la tradition familiale et des généalogistes, donnera une lecture inédite de cette guerre avec ses champs de bataille, ses stratégies militaires et ses héros.
Les divers acteurs de la communauté (gestionnaire du patrimoine, économiste, environnementaliste, éducateurs, autorités publics, hommes d’affaires…) se chargeront de la valorisation des ressources patrimoniales révélées et transmises par le collectif social, pour faire émerger l’identité culturelle du terroir.
Nous aurons ainsi ces différents intervenants
L’histoire de Safilem à travers les sources archivistiques et documentaire (Professeur Sidy Fakha Diop, Babacar Diagne, Abibatou Diop)
La saga de Safilem ou les récits légendaires (Idrissa Dieye, Amadou Ndiouk, Ibrahima Sow, Maimouna Diop…)
La signification de Safilem comme patrimoine historique immatériel à préserver et à valoriser (Professeur Ismaila Ciss ou Abdoulaye Touré IFAN, Babacar Diallo).
Le professeur Babacar Fall sera le modérateur.