LÉGISLATIVES ANTICIPÉES ET CODE ÉLECTORAL: Imbroglio juridique 

Les élections législatives du 17 novembre prochain vont se tenir dans des conditions très particulières marquées par de nouvelles règles concernant la question de la mise en œuvre des dispositions du Code électoral relatives…

La Constitution parle de 90 jours au maximum, c’est le Code électoral qui aurait dû avoir une disposition relative aux élections anticipées pour préciser ce qu’il y a lieu de faire. “Quand vous prenez l’exemple de la caution, le Code électoral prend en compte cette situation parce qu’il dit qu’en cas d’élections anticipées, c’est le montant de la caution précédente qui est reconduit”. Malheureusement, en ce qui concerne le parrainage, le Code électoral est muet.

Le Conseil constitutionnel, après avoir décidé que la dissolution de l’Assemblée nationale a également précisé que les « dispositions du Code électoral relatives au parrainage ne sont pas applicables aux élections législatives anticipées, en cas de dissolution de l’Assemblée nationale ». Autrement dit, il n’y aura pas de parrainage pour ces législatives anticipées du 17 novembre prochain. Pour motiver cette décision conformément aux dispositions de l’article 24 de la loi organique n° 2016-23 du 14 juillet 2016 relative au Conseil constitutionnel, Mamadou Badio Camara, président du Conseil, et ses collègues ont commencé par rappeler que l’article 87 alinéa 3 de la Constitution dispose que « Le décret de dissolution fixe la date du scrutin pour l’élection des députés. Le scrutin a lieu soixante (60) jours au moins et quatre-vingt-dix jours (90) au plus après la date de publication du décret ». Mais aussi « que d’autres délais prévus par le Code électoral sont incompatibles avec le délai maximum de 90 jours prévu par l’article 87 de la Constitution pour l’organisation du scrutin».

Les « 7 Sages » ont également fait savoir que l’article L.176 du Code électoral dispose « qu’au plus tard 88 jours avant celui du scrutin, le Ministre chargé des élections institue par arrêté une commission de réception. Celle-ci est chargée 85 jours au plus et 60 jours au moins avant celui du scrutin de la réception matérielle de l’intégralité des listes de parrainage et des dossiers de candidature (…). A l’issue du contrôle des listes de parrainage et éventuellement des régularisations y afférentes, la commission de réception entame l’étude pour la recevabilité juridique des dossiers de candidature 75 jours avant celui du scrutin » ; Partant de ce fait, ils ont estimé que « l’articulation de ces délais avec celui prévu à l’article 87 de la Constitution ne laisse qu’une marge de temps de 5 à 30 jours, insuffisante pour la collecte et la mise en place du dispositif juridique et technique de vérification des parrainages». Et en conclusion, ils ont décidé « qu’en vertu du principe de la hiérarchie des normes qui consacre la suprématie des dispositions constitutionnelles sur celles du Code électoral, il y a lieu de dire que les dispositions relatives au parrainage ne peuvent être appliquées aux élections législatives anticipées ».

Montant de la Caution fixé à 15 millions 

Outre l’article L.176 du Code électoral relatif au parrainage, la tenue de ces législatives anticipées du 17 novembre prochain impactera également la mise en œuvre des dispositions de l’article L. 175 alinéa 2, du Code électoral relatif au montant de la caution à verser à la Caisse des dépôts et consignation par les partis politiques et les coalitions de partis de même que les entités indépendantes qui voudraient participer à ces législatives. En effet, dans cette décision n° 2/C/2024 rendue le 12 juillet dernier en réponse à la lettre confidentielle n° 000349/PR/CAB du Président de la République le 5 juillet 2024 qui sollicitait son avis sur la date légale de la dissolution de l’Assemblée nationale et celle de la tenue des élections législatives anticipées, le Conseil constitutionnel a également profité de cette saisine pour résoudre l’équation de ce montant de la caution que le ministre de l’Intérieur en charge de l’organisation des élections est appelé à fixer par arrêté, après consultation des acteurs politiques à la veille de chaque élection.

Cablé par l’Evidence, le constitutionnaliste Dr Abdoul Aziz Mbodj parle d’un véritable test pour notre système électoral et notre administration d’organiser des élections législatives dans ces conditions.
« Depuis des décennies on organise des élections au Sénégal, mais souvent des élections plus ou moins intègres. Ici c’est l’urgence et presque la quasi suspense du code électoral qui est là particularité.
On peut avoir des élections intègres si l’administration s’adapte et se met dans l’urgence.
Il y a énormément d’actes pré-électoraux à prendre et les un sont les liés aux autres . Si l’administration intègre cela, elle peut réussir le scrutin », a-t-il expliqué.

Cheikh Ibrahima Diagne