L’affaire de la gestion controversée des fonds alloués à la lutte contre la Covid-19 continue de livrer ses secrets. Ce jeudi, lors d’un point de presse conjoint animé par le procureur général Mbacké Fall, le procureur de la République Ibrahima Ndoye, et le procureur financier El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla, de nouvelles révélations ont été faites sur les ministères impliqués dans les irrégularités relevées par les audits.
Selon le procureur Ibrahima Ndoye, huit rapports transmis au parquet concernent huit ministères différents, officiellement épinglés dans le cadre de l’enquête sur les fonds Covid-19. Les départements visés sont :
Le ministère des Mines et de la Géologie
Le ministère de la Culture et de la Communication
Le ministère de la Jeunesse
Le ministère des Sports
Le ministère de la Santé
Le ministère de la Femme, de la Famille, du Genre et de la Protection de l’Enfance
Le ministère du Développement industriel et des Petites et Moyennes Industries (PMI)
Le ministère du Développement communautaire
Ces ministères sont soupçonnés de mauvaise gestion, voire de détournements de deniers publics, dans le cadre du fonds de riposte et de solidarité contre les effets de la pandémie, également connu sous le nom de Force Covid-19.
Le parquet a réaffirmé sa détermination à traiter ce dossier avec rigueur et transparence, tout en respectant la présomption d’innocence des personnes concernées. Des procédures sont en cours, certaines personnalités ont déjà été entendues ou mises en examen, et des résolutions de mise en accusation ont été transmises à l’Assemblée nationale pour les ministres en fonction à l’époque des faits.
Les conditions du cautionnement précisées par le parquet
Dans le cadre des poursuites judiciaires liées à la gestion des fonds Covid-19, le parquet financier a apporté des précisions importantes sur les conditions de cautionnement permettant aux mis en cause d’obtenir une liberté provisoire. Lors du point de presse tenu ce jeudi au Tribunal de Dakar, le procureur général Mbacké Fall et le procureur financier El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla ont expliqué les fondements juridiques et les critères d’éligibilité à cette mesure.
Selon le procureur général, les juges d’instruction, en accord avec le ministère public, peuvent accorder la liberté provisoire sous caution à toute personne inculpée de détournement, escroquerie ou soustraction de deniers publics, conformément à l’article 140 du Code de procédure pénale sénégalais. Cette disposition prévoit la possibilité de mise en liberté sous certaines conditions. « L’inculpé doit reconnaître les faits et accepter de rembourser les montants détournés, ou prouver que son état de santé ne lui permet pas de supporter la détention », a déclaré Mbacké Fall. « L’objectif n’est pas simplement d’incarcérer, mais de recouvrer les deniers publics au profit de l’État, a-t-il ajouté »
Le procureur a également précisé que chaque décision de mise en liberté provisoire est encadrée par la loi. En cas de désaccord avec l’ordonnance du juge d’instruction, le parquet dispose d’un délai de recours de cinq jours à compter de la notification.
De son côté, le procureur financier Alioune Abdoulaye Sylla a souligné que la validation d’un cautionnement n’est possible que lorsque toutes les conditions légales sont réunies. « Quand ces conditions sont respectées, nous donnons une suite favorable. Sinon, nous nous opposons à la demande », a-t-il précisé.
262 personnes arrêtées et 15 milliards FCFA récupérés depuis sa création
Le Pool judiciaire financier (PJF), mis en place pour lutter contre les crimes économiques et financiers, affiche un bilan d’activité significatif depuis son installation. Selon son procureur en chef, El Hadji Alioune Abdoulaye Sylla, 262 personnes ont été arrêtées dans le cadre de 292 dossiers instruits, avec un total de 15 milliards de francs CFA recouvrés ou saisis.
Lors d’un point de presse tenu ce jeudi, le procureur Sylla a salué l’engagement de ses équipes, tout en soulignant les obstacles rencontrés dans certaines enquêtes. Il a notamment évoqué la lenteur des procédures, qu’il attribue en partie à la présence de certains mis en cause hors du territoire national. « Dans ces cas, il est impératif de mettre en place une coopération judiciaire internationale pour faire avancer les dossiers », a-t-il précisé.
Le procureur a également attiré l’attention sur le niveau de sophistication des stratagèmes utilisés par certains suspects : « Nous faisons face à de véritables experts en dissimulation. Leurs méthodes exigent des investigations longues, minutieuses et techniques. »