Cheikh Yérim Seck: La déchéance d’une plume autrefois respectée

Jadis considéré comme l’une des voix les plus crédibles du paysage médiatique sénégalais, Cheikh Yérim Seck traverse aujourd’hui une période difficile marquée par une perte notable de crédibilité et une remise en cause grandissante de sa stature publique.

Ancien journaliste de renom passé par Jeune Afrique, Seck s’était imposé dans les années 2000 et 2010 comme un analyste politique lucide, souvent en avance sur les grands débats. Sa plume incisive, son verbe précis et son sens aigu de l’analyse en avaient fait une référence, écoutée aussi bien par les citoyens que par les décideurs. Mais ce temps semble désormais bien loin.

Depuis quelques années, l’image de Cheikh Yérim Seck s’est lentement dégradée, à la faveur de prises de position controversées et de propos jugés populistes. Cette évolution a culminé récemment lorsqu’il a déclaré, lors d’une de ses interventions publiques, qu’il n’hésiterait pas à payer un insulteur professionnel pour le défendre s’il venait à être attaqué sur les réseaux sociaux. Une sortie pour le moins déroutante qui a suscité moqueries et indignation, notamment chez les plus jeunes internautes, prompts à tourner l’affaire en dérision sur X (ex-Twitter) et TikTok.

Loin de l’analyste pondéré qu’il incarnait, l’homme apparaît aujourd’hui isolé, en rupture avec l’élite intellectuelle qu’il côtoyait autrefois. Certains observateurs évoquent un glissement vers une posture de plus en plus populiste, où la provocation semble avoir remplacé la rigueur analytique. D’autres y voient une stratégie désespérée pour rester visible dans un espace médiatique saturé, où la confrontation et la polémique ont souvent plus d’écho que la profondeur du propos.

Cette déchéance médiatique, bien que douloureuse à observer, pose des questions plus larges sur le rôle des intellectuels dans l’espace public sénégalais et sur les transformations profondes de la sphère médiatique, de plus en plus influencée par la viralité plutôt que par la réflexion.

Cheikh Yérim Seck reste néanmoins un acteur qui a marqué l’histoire du journalisme politique au Sénégal. Mais son avenir dépendra sans doute de sa capacité à se réinventer — ou à faire le choix du silence, avant que son nom ne devienne définitivement synonyme d’un gâchis intellectuel.

Sadio FATY